Petite histoire sexiste de la langue française et importance de l’écriture inclusive
Quoique cela puisse paraître surprenant, la féminisation de la langue française existait bien avant aujourd’hui. Il ne s’agit pas d’une pratique nouvelle, mais qui date de plusieurs centaines d’années. En passant par les noms de métiers et les règles de grammaire, le genre grammatical féminin avait une place au sein même de la linguistique. Par exemple, le terme « autrice » était souvent utilisé pour désigner une femme qui écrit, et ce, jusqu’au XVIIe siècle (Pilote et Montreuil, 2020). Que s’est-il passé depuis ?
Avec l’arrivée de la modernité, les femmes ont été reléguées à l’espace privé. De la chasse aux sorcières à leur absence dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la masculinisation de la langue française s’inscrit dans une stratégie politique d’évincement des femmes de la sphère publique. Celle-ci est causée, entre autres, par la façon dont l’Académie française la codifie. Le mot « autrice » a donc été effacé au profit du terme « auteur », qu’on considérait comme plus universel (Pilote et Montreuil, 2020). L’universel étant l’homme, le genre des professions « sérieuses » devient le masculin. Pour consolider cette transformation de la langue, les règles de grammaire appliquent alors la célèbre phrase : « le masculin l’emporte sur le féminin ». Le langage n’est pas neutre et la volonté d’invisibiliser une grande partie de la population fait partie d’un projet politique servant à asseoir une domination masculine. Ce guide s’inscrit, au contraire, dans une volonté de refuser cette invisibilisation et cette hiérarchie dans la langue.
Il existe aujourd’hui plusieurs stratégies de rédaction féministes, queer et antioppressives. Ce guide de rédaction inclusive cherche à offrir des pistes de solution efficaces pour pratiquer ce type d’écriture, afin de transformer la langue pour qu’elle soit plus représentative de toustes.
L’écriture inclusive est importante afin de contrer l’invisibilisation des personnes qui ne sont pas des hommes cisgenres et afin de rendre la langue accessible et plus représentative de toustes. L’écriture inclusive permet de faire face à l’hétéro-cis-sexisme, autant dans la vie courante que dans les sphères éducatives, en prônant notamment une déhiérarchisation des genres. Les espaces universitaires étant majoritairement masculins, blancs, cis et hétéronormatifs, l’écriture inclusive permet de se les approprier et ainsi de contrer une surreprésentation masculine.
Adopter une telle forme d’écriture peut faciliter la vie de plusieurs personnes : les personnes trans, non-binaires, agenres, queer, en questionnement et toustes celleux n’étant pas à l’aise avec la binarité des genres. L’écriture inclusive permet donc d’être sensible à toutes les réalités en donnant un accès et une représentation à toustes.
Bibliographie
CHOLLET, Mona. Sorcières : la puissance invaincue des femmes, Montréal, Éditions Zones, 2018, 256 p.
PILOTE, Anne-Marie et Arnaud MONTREUIL. « Pour une légitimation du terme ‘’autrice’’ », Le Devoir, [En ligne], 13 janvier 2020, https://www.ledevoir.com/opinion/idees/570675/langue-francaise-pour-une-legitimation-du-terme-autrice.
ZACCOUR, Suzanne et Michaël LESSARD. Dictionnaire critique du sexisme linguistique, Montréal, Éditions Somme toute, 2017, 264 p.